Je suis assise sur la plage, j?aime cet endroit, ce sont mes plus beaux souvenirs. Comme je n?en ai pas beaucoup, je crois que c?est naturellement que je viens ici souvent. Quand les choses ne vont pas, j?aime venir me perdre ici, même si beaucoup de monde y vient, j?arrive toujours à trouver un endroit où me poser tranquillement. Je me souviens alors de ces années où j?étais toute petite et où tout roulait encore comme sur des roulettes pour moi. Mon frère et mon père étaient vivants, ma mère était encore souriante et aimante, la petite vie parfaite en somme. Surtout, j?étais encore proche de ma jumelle, même si parfois elle m?agaçait, nous nous entendions tous comme une vraie famille? Puis l?accident est arrivé et tout est parti a volo?

Je regarde les gens autour de moi et parfois, je les envie parce qu?ils ont l?air heureux et moi, j?ai toujours l?impression que je ne le serai jamais. Pourtant, j?ai un petit sourire sur les lèvres quand je pose naturellement ma main sur mon ventre. Il est très rond maintenant, ma grossesse, je ne peux plus la cacher, elle est là et c?est imminent avant que mon petit ange ne vienne au monde. Enfin, quelque chose de positif m?arrive et même si je suis apeurée par ce rôle qui sera le mien, j?ai confiance. Je suis enfin entourée par quelques amis qui tiennent réellement à moi et qui veulent que j?aille bien. Pourtant, je sais que parfois, je me sentirais seule et inutile, je sais que j?aurais des doutes mais je sais aussi que je l?aimerais plus que tout au monde et que je ferai mon maximum pour ce petit bout. Je me lève alors et je me mets à marcher vers l?eau, mes mains entourent mon ventre et je baise les yeux vers lui :

« Je t?emmènerai souvent ici, tu vas voir ! On s?en tirera tous les deux ! »

Je dis cela comme pour me rassurer moi aussi et certainement surtout. J?entends alors une voix qui me glace le sang, cette voix que je ne pensais plus entendre. Cette voix qui est mon cauchemar et qui tombe très mal. Je ne veux pas qu?elle sache que je suis enceinte, je dois bien l?avouer, je ne sais pas ce dont elle serait capable si elle apprenait ma grossesse. Nous avions coupé les ponts toutes les deux et je m?en portais bien mieux ainsi? Doucement, je me retourne et fais face à mon double, ma jumelle, Roxanne.

« Roxy ! »

Dis-je d?un ton las, j?en ai marre de nos disputes, je suis fatiguée d?être toujours en guerre contre elle. Elle m?a volée ma vie, oui, mais j?en ai marre de lui en vouloir. Je veux juste continuer cette vie qui aurait dû être la sienne du mieux que je peux. Mais, j?ai bien peur que de son côté, elle ne l?entende pas de cette manière.

« Qu?est-ce qui t?amène à Oceanside ? Tu viens voir maman ? »

Je ne peux pas vraiment lui en faire le reproche, ce reproche de l?avoir abandonnée alors que je l?ai fait bien avant. Mon ton est cordial, il n?est pas heureux mais il n?y a pas d?animosité dans ma voix, contrairement à la sienne.

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Avec Roxanne, je ne savais jamais à quoi m’en tenir. Je savais qu’elle était capable de bien des choses et surtout, elle s’en sortait toujours. Contrairement à moi, elle avait ce côté sainte nitouche que tout le monde semblait avoir accepté. J’avais passé des années à lui en vouloir et, il y a encore peu, je lui en voulais encore. Mais, je me rends compte, en la voyant là, devant moi, que je ne suis plus en colère contre elle. Non, je veux tourner la page, je veux avancer pour une fois et ce petit bout qui grandit en moi va m’aider, je veux y arriver pour lui. Ce bébé est un renouveau pour moi, un vrai renouveau, je le sens, ma vie me semble moins catastrophique depuis que je sais que je suis enceinte. Ok, je panique un peu de devoir élever un enfant seule mais je ne serai pas la première dans ce cas. Je ne suis plus en colère contre elle mais je devais bien l’avouer, sa présence me mettait mal à l’aise et surtout, elle me faisait un peu peur parce que je savais qu’elle pouvait rendre ma vie un enfer si elle le voulait et ce, sans éveiller les soupçons. Je tressaille quand elle m’annonce qu’elle s’installe en ville et que je n’avais pas intérêt à me mettre sur son chemin. Elle n’oublia pas de me prévenir qu’elle ne payerait pas les factures de notre mère… Enfin, sa mère parce qu’au fond, je ne la considère plus comme ma mère depuis très longtemps…

« Ecoute, je n’ai pas l’intention de me mettre sur ton chemin, faisons comme si nous ne nous connaissions pas et on s’en portera mieux toutes les deux ! »

Dis-je un peu plus froidement, pas parce que j’étais en colère mais parce que son petit jeu ne m’intéressait plus. Je n’avais plus l’intention d’être son jouet entre ses mains, je voulais continuer ma vie tranquillement et si elle devait partager la ville dans laquelle on a grandi et bien, je ferai comme si de rien n’était, je l’éviterai le plus possible.

« Et ne t’inquiète pas, je m’occupe de ta mère depuis que tu l’as mise à l’hôpital ici ! »

Lui dis-je, je devais bien le reconnaître, je ne faisais que payer du mieux que je le pouvais – grâce à Chris, notre cousin. Je lui devais beaucoup pour ça parce qu’une fois ma génitrice dans mes pattes, j’aurais pu tomber bien bas. Je sens son regard qui me scrute et machinalement, comme pour protéger mon enfant de cette tante un peu effrayante, je pose ma main sur mon ventre. A sa manière, elle me fit une remarque sur mon état évidemment, finissant par des félicitations qui sonnaient fausses. Je restais un peu muette, ne pas entrer dans son jeu, surtout ne pas entrer dans son jeu me dis-je dans la tête.

« Merci ! »

Me contentais-je donc de dire, me mordant la lèvre pour ne pas rajouter quelque chose d’aussi sarcastique qu’elle. Puis, mes yeux s’agrandirent quand elle avoua quelque chose qu’elle n’avait encore jamais dit : elle m’avait volé ma vie… Mais surtout, elle voulait me voler mon enfant ? Euh !! J’étais sûre qu’elle en serait capable et c’était bien ça qui me faisait peur… J’aurais tout donné pour avoir un enregistrement de ce moment, pour que je nous mette à l’abri, mon enfant et moi.

« Ça fait tellement de bien de t’entendre enfin admettre que tu m’as volé ma vie ! »

Là, Je bouillais à l’intérieur, la mère protectrice que j’étais aurais aimé la mettre en garde mais pour le bien de mon enfant, je m’écrasais. Je ne voulais pas la tenter, je ne voulais pas qu’elle mette son plan à exécution pour me voler mon enfant. Je mettrais tout en mon pouvoir pour qu’elle ne puisse jamais me le voler ou lui faire du mal, quitte à quitter la ville définitivement… En secouant la tête, elle me conseille d’aller au spa pour me faire masser parce que j’ai un teint fatigué. Non mais sans blague, avec tous les événements qui se sont enchaînés, comment j’aurais pu avoir un teint moins fatigué…

« Et avec quel argent ? Ta mère me ruine déjà bien assez comme ça ! Et puis, nous n’avons pas tous la chance d’avoir eu une vie parfaite, hein, Roxy ! Mais à quel prix finalement ? Tu es heureuse ? »

Dis-je sur un ton neutre mais j’étais curieuse de savoir si réellement, elle était heureuse. Est-ce qu’être à ma place l’a rendue heureuse ? Nos cheveux volent dans le vent, je les laisse aller tandis qu’elle les remet en place avant de me lancer une bombe encore une fois. Elle me demande si j’ai encore envie de lui rouler dessus ou plutôt d’un meurtre. Enfin, elle me demande comment je vais. J’écarquille les yeux, un peu surprise par cette demande : a-t-elle réellement envie de savoir ?

« Sérieux ? Tu veux réellement savoir comment ou tu t’en contre-fiche ? D’ailleurs, est-ce que tu veux savoir si je suis toujours l’épave que tu as connue ? »

L’énervement revient doucement, autant la voir ne m’exaspère plus mais l’entendre feindre l’intérêt à mon égard me rend colérique mais je reste tout de même calme, ce sont mes yeux qui se fâchent…

« Je vais bien oui, il y a quelques mois, tu te serais réjouies de voir ma vie partir en vrille – grâce à ta mère et toi d’ailleurs, comme d’habitude – mais non, je me sens bien maintenant ! »

Dis-je baissant les yeux vers mon ventre, un petit sourire aux lèvres, de manière instinctive mais je relève les yeux aussi vite parce que je me rends compte que je viens de lui révéler la personne qui me rend heureuse, une carte pour elle de me rendre une fois de plus malheureuse… Et détruire à jamais ma vie…

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