J'avais cette folle impression que la clé permettant de résoudre le mystère, et de reprendre un temps soit peu le contrôle de ma vie, se trouvait ici à Oceanside et pourtant je dois admettre que depuis mon retour j'avais la folle impression d'errer totalement tant cet élément déclencheur semblait terriblement me faire défaut. Bien entendu j'avais recommencé à renouer avec certains aspects de ma vie, comme par exemple reprendre le contrôle de la gestion de mes affaires personnelles. Évidemment certaines personnes m'y  avaient fortement aidés. Néanmoins je croisais souvent des gens qui prétendaient que l'on se connaissait depuis des années, cela m'arrachait le cœur de les décevoir en leur disant que je n'avais pas la moindre idée de qui ils étaient. La tristesse et la déception semblait vouloir se lire sur leur visage mais je ne me voyais pas leur mentir en leur faisant croire que je me souvenais parfaitement d'eux, ce genre de mensonge ne pouvait que m'éclater au visage.

M'étant levé assez tôt ce matin je devais me rendre à l’hôpital pour cette consultation avec la neurologue, pour ensuite enchaîner avec la psychiatre fortement recommandée par l'armée. J'avais beau suivre leurs recommandations néanmoins les résultats tardaient à se manifester. J'en avais ma claque de tout mettre en œuvre pour reprendre le contrôle de ma vie et de constater qu'aussi fort j'essayais qu'au final ce n'était pas assez. En gros macho que je suis je me retenais pour ne pas fondre en larmes mais je sentais, que dans mon for intérieur, je ne demandais qu'à laisser ma peine et ma rage prendre le dessus.

Sortant de l’hôpital, les yeux larmoyants,  je me dirigeai vers ma voiture et d'un geste aussi vif que violent je balançai une droite sur le capot. Évidemment je n'avais pas aperçu ce léger bout de ferraille à l'aspect plus que contondant et dès que je senti cette mince feuille d'acier trancher ma peau, laissant un peu de sang s'écouler, j'échappai un de ces jurons dont moi seul pouvait avoir le secret. « Putain !!!!!! » Dis-je avant de m'empoigner la main afin de stopper maladroitement hémorragie. Une autre maladresse digne de Blake Foster.

L'entaille semblait profonde, d'ailleurs on pouvait aisément apercevoir ce qui ressemblait à un ossement, de toute évidence je ne m'étais pas loupé. Il fallait avoir le cœur solide mais pour ma part j'en avais vu d'autres, je ne risquais donc pas de m'évanouir. Évidemment je n'étais pas forcément fier d'avoir échapper ce vilain juron mais par moment il y a de ces réactions que nous ne contrôlons pas tous forcément.

Depuis mon retour j'avais l'impression de me retrouver livré à moi-même, un peu comme si l'armée avait décidé de s'en laver les mains, je dois admettre qu'un fort sentiment d'injustice m'habitait. Néanmoins je souris, faiblement, lorsque j'entendis la voix de cette femme m'adresser la parole lorsqu'elle me proposa son aide.

« Merci, c'est gentil de votre part. »

Lui dis-je sur un ton qui ne semblait nullement inquiété par la situation alors que ma plaie saignait abondamment. Je me sentais responsable du fait qu'elle venait de souiller ce fort joi mouchoir afin de stopper l'écoulement de sang qui s'échappait de ma main.

« Un si joli mouchoir, quel dommage. Faudra me dire combien je vous dois. »

J'eus ensuite un sourire, se voulant légèrement amusé, lorsqu'elle me fit part que je me retrouvais au meilleur endroit possible pour subir une telle blessure.

« Effectivement, bien que je m'en serais tout de même passé. »

Son regard, croisa finalement le mien, me procura une sensation pour le moins étrange. On aurait dit, à en juger par son regard, qu'elle me connaissait alors que pour ma part j'avais la forte impression que nous nous rencontrions pour la toute première fois. On dirait que ce cauchemar du quel je m'efforce de m'extirper n'en a pas encore fini avec moi. Bien entendu j'aurais pu lui demander, banalement, si l'on se connaissait mais la réponse que m'avait balancé son regard se voulait si évidente que la question m'avait parue plus que superflue.

Bien que l'entaille à ma main me faisait légèrement souffrir je me gardais bien de le laisser paraître et j'en profitais pour faire de l'humour. D'aussi loin que je ne me souvienne, dans les limites que m'imposait mon amnésie, j'ai toujours agi de la sorte je ne me voyais pas commencer à me comporter autrement maintenant.

« Ça risque de me coûter la peau des fesses ? »

Évidemment je plaisantais ; je me doutais bien que ce ne serait pas le cas mais la situation se voulait assez dramatique, je trouvais on ne peut plus ridicule d'en ajouter une couche. Cependant la jolie dame marquait un point, ma blessure allait requérir une intervention médicale urgente.

« Je n'ai pas l'impression que les os de la main soient touchés, ni les divers tendons, mais bon je vais tout de même laisser les professionnels regarder tout ça. Ce sont eux les experts après tout. »

Ce moment, empreint d'une folle tension, alors que nos regards se croisèrent et se fondèrent l'un dans l'autre n'avait pu qu'éveiller en moi quelques soupçons et rapidement Madison les confirma lorsqu'elle m'adressa ces quelques mots. De toute évidence elle me connaissait puisqu'elle s'était permise de s'adresser à moi en utilisant mon prénom. De mon côté j'avais beau réfléchir, chercher son prénom dans chaque recoins de mon cerveau, rien ne semblait vouloir ressurgir à la surface. Je vous jure ne rien connaître de mon passé se voulait une sacrée torture.

« Effectivement, Blake est mon prénom. Je suis sincèrement navré mais je n'ai pas la moindre idée du vôtre. Vous vous appelez ? » Bien entendu je me doutais que ces mots que je venais de lui adresser allaient être de nature à la blesser profondément. « Je suis sincèrement désolé, vraiment, c'est hors de mon contrôle. Totalement » Lui dis-je alors que la porte coulissante du hall d'entrée nous permis de se diriger vers le comptoir des admissions de l’hôpital. Entre l'état de ma main et l'état d'esprit dans lequel je venais de plonger Madison je ne saurais dire ce qui était le plus urgent à régler comme soucis.